« Qui veut déplacer une montagne, commence par déplacer de petites pierres ». Confucius

J’ai essayé, tout au long de mes derniers articles, de vous dépeindre le cadre dans lequel ma mission m’a amenée à vivre mais je ne vous ai pas encore parlé de ceux qui, pourtant, sont omniprésents dans mon quotidien …

Je ne vous parle pas des lézards 😉 (et pourtant ils sont nombreux). Je ne vous parle pas des grains de riz (ceux-là on ne les compte pas non plus). Je vous parle des enfants…

IMG_3953 copy.jpg

Ils sont 48, ont entre 7 et 21 ans. Majoritairement issus de l’ethnie karen qui peuple les frontières mais également de l’ethnie Hmong et de quelques Birmans. Ces enfants courent, rient, jouent, se chamaillent. Ils sont heureux et me donnent chaque jour une claque de leur bonheur. Ils sont heureux mais pourtant… chacun d’entre eux a son histoire, et ce n’est pas celle des contes de fées. Chacun d’entre eux a sa valise, son lot de problèmes, de traumatismes. Et pourtant, chaque jour, ils font le choix de sourire à ce que la vie leur donne. Dans leur situation, combien de nous baisseraient les bras, se plaindraient pour dix fois moins, verraient les difficultés en premier lorsqu’elles se présentent. Eux, se lèvent, se battent et essayent de tirer leurs épingles du jeu. Leurs vies ne sont pas parfaites, ils auraient pu avoir plus de chance, mais ils ont décidé de saisir celles qu’ils avaient.

Cela me fait relativiser. Sur le pourquoi du comment du bonheur. « Nous sommes pauvres, mais heureux » me disait le Père Ponchaï. Oh oui, je veux bien le croire. Car c’est rare de voir les larmes dans les yeux de ses enfants – peut-être sont-ils trop pudiques me direz-vous. C’est rare de les voir s’énerver ou de les voir triste. C’est rare d’entendre des « Maj Sabaj » (ça ne va pas) en réponse à mes « Sabaj dii maj ? » (Est-ce que ça va ?).

Parfois, il m’arrive de me décourager. De ne pas voir le bout du tunnel. De me demander pourquoi je suis là. Si je leur apporte vraiment quelque chose mis à part leur apprendre quelques bases d’anglais. Je me sens inutile, là, au milieu de mes montagnes, à réfléchir à comment leur apprendre à dire quel temps il fait. Parfois je me sens impuissante face à ce qu’eux sont capables de traverser. Car oui, le plus difficile à accepter, c’est qu’ils n’aient pas besoin de moi. Je ne leur suis pas indispensable. Ils ont appris à grandir sans leurs parents, sans des bras pour les enlacer, sans des paroles douces avant de s’endormir. Ils ont appris à vivre avec peu. Et continueraient à vivre ainsi si je n’étais pas là. C’est aussi une grande leçon d’humilité que d’être là sans qu’ils n’aient réellement besoin de moi.

Alors quand je me pose trop toutes ces questions, sans arriver à trouver le sens de tout ça, de ma présence ici… quand je vois la goutte d’eau et pas l’océan…quand je me demande pourquoi sur terre, des enfants naissent en France, entourés, et d’autres au fin fond des montagnes thaïlandaises, et sont abandonnés… Alors, je lève la tête et je les vois. A une certaine échelle, c’est dérisoire. J’apprends des bases d’anglais à un peu moins de 250 élèves. Je m’occupe d’une quarantaine d’enfants habitant dans mon centre le reste du temps. Je joue au ping pong, au Uno, je fais des tresses, je fais des parties de président. Je dance sur « Head, Shoulders, Knees and Toes ». J’écoute en boucle la chanson de la Reine des Neiges en thaïlandais. Mais ensuite j’oublie toutes mes questions et je comprends le pourquoi du comment de ma présence ici. Je suis là pour eux. Ai-je besoin de chercher autre chose ? Je ne suis pas là pour changer le monde. Non. Ni pour changer leur monde. Mais j’espère pouvoir parfois le rendre plus doux, plus heureux. Au détour d’un sourire, d’un câlin. D’un fou rire. Je n’ai pas d’autres ambitions que d’être là pour eux. Car, dans leurs vies, cela n’a pas toujours été le cas. Eux ne se posent pas toutes ces questions. Ils acceptent la vie comme elle vient et accueillent ce qu’ils ont et ce qu’ils sont.  Car à travers leurs sourires, et à travers le mien, ils savent. Ils savent qu’ils ont de l’importance pour moi. Que mon but c’est de leur faire oublier que leurs vies ne sont pas parfaites, mais qu’ils sont aimés, qu’ils comptent pour quelqu’un et qu’ils ont le droit d’être heureux.

Alors oui, ce n’est qu’une petite échelle sur la grande échelle du monde et de la vie.  Mais comme dit Confucius, « Qui veut déplacer une montagne, commence par déplacer de petites pierres ».

Je ne suis qu’une goutte d’eau dans l’océan. Mais s’il y a d’autres gouttes d’eau, il peut y avoir des vagues. Alors j’en profite pour surfer dessus et vous dire que si vous aussi, vous avez envie de faire des vagues, c’est bien possible… Si vous avez envie de donner une chance à un enfant, de lui permettre d’aller à l’école, d’obtenir un diplôme, d’aller à l’université, si vous avez envie de tout ça et bien c’est possible.

L’association Enfants du Mékong agit depuis 1958 dans toute l’Asie du Sud-Est (Vietnam, Thaïlande, Laos, Philippines, Cambodge, Birmanie et Chine) afin d’aider les enfants à accéder à l’éducation et donne une chance à leurs familles de sortir de la pauvreté. Depuis bientôt 60 ans, ils ont mis en place 22 000 parrainages et ont soutenus 60 000 enfants. Alors si vous voulez faire partie de cette incroyable aventure humaine, si vous voulez offrir une chance à un enfant, si vous voulez offrir un parrainage à quelqu’un de votre entourage, c’est par ici :  http://parrainage.enfantsdumekong.com/site/.

Pensez-y… Ça change une vie… et cela fera un petit quelque chose à la vôtre de savoir que vous avez déplacé la petite pierre d’une montagne, que vous avez été la goutte d’eau d’une vague…

Merci pour eux,

A très bientôt,

Mélanie

 

2 commentaires

  1. En effet c’est incroyable ce que des petits bouts comme eux peuvent nous apporter et nous apprendre plus que ceux du pourquoi nous sommes la initialement.
    Tu vas en ressortir très belle et humble de cette expérience, ton regard sur la vie ne sera que meilleur et différent. Je te comprends à 100% car vécu une expérience similaire comme tu le sais et à chaque fois que j’en parle, j’en suis aux larmes, touché à vie.
    Je te fais des bisous, je suis content de t’y voir heureuse.

    J’aime

Laisser un commentaire